Alidor et Angélique sont jeunes, beaux, riches et ils s’aiment à la folie. Tout va donc pour le mieux, sauf qu’Alidor est au bord de l’implosion ! A son meilleur ami, Cléandre, il avoue devoir à tout prix s’arracher cet amour qui le possède au détriment, dit-il, de son libre arbitre
et de son intégrité… Et voilà que Cléandre ose lui confier en retour être lui aussi follement épris d’Angélique – bien qu’il n’en ait jamais rien laissé paraître, pour ne pas marcher sur les plates-bandes de son ami... Eurêka ! Alidor sait maintenant comment se séparer d’Angélique, puisqu’il peut la céder à cet « autre lui-même » qu’est Cléandre !...
Une (fausse) lettre d’amour adressée à une (prétendue) maîtresse d’Alidor tombe “comme par hasard” entre les mains d’Angélique ! Blessée à mort, elle interroge Alidor, qui répond par la provocation aux reproches et par le ricanement aux larmes de son amoureuse.
Mission accomplie : Angélique rompt avec lui et, pour se venger, se dit prête à épouser le premier venu !
A l’inverse du sempiternel cliché qui leur est injustement accolé, les pièces de Corneille sont tout sauf compassées et ennuyeuses, elles sont au contraire hyperactives et étonnantes, et proposent, par-delà les siècles, une réflexion aiguë, parfois même radicale, mais toujours émouvante, sur le sens qu’on peut donner à nos existences en ce bas-monde, malgré toutes les surdéterminations qui fondent la condition
humaine.
François Rancillac